Stress au travail, burn-out, absentéisme et maladies cardiovasculaires

Par le Professeur Pascal Janne

L’intitulé donne l’apparence d’une causalité entre, d’une part, le stress au travail et le burnout et d’autre part, l’absentéisme et les maladies cardiovasculaires.

Dans la pratique, les choses sont assez différentes.
L’étude des mécanismes sous-tendant le « stress », initialement centrée sur des relais endocriniens, progresse maintenant dans la voie de voies plus fines comprenant les relais immunitaires et inflammatoires, en parallèle d’ailleurs avec les travaux de recherche sur les maladies cardio-vasculaires. Toutefois les moyens de mesure du stress et du « burnout » restent méthodologiquement critiquables et ces concepts restent difficiles à appréhender de façon opérationnelle.
Les données épidémiologiques reliant directement le stress et les maladies cardiovasculaires sont peu évidentes, contradictoires et n’expliquent au mieux que 5 % de l’occurrence de la maladie. Par contre le stress peut - par le relai de mécanismes indirects - faciliter l’occurrence et le développement des facteurs de risque traditionnels et susciter des mécanismes inflammatoires prédisposant aux maladies cardio-vasculaires. Il en va de même pour la charge psychosociale ( « strain » ).
Le phénomène d’absentéisme ( qui s’atténue en temps de crise ) se voit relayer par son corolaire : le « présentéisme », qui consiste à venir travailler en étant sous-productif, ce qui crée des réactions de type « réverbérant » au sein des équipes. Les premières analyses donnent à penser que le coût du présentéisme est supérieur à celui de l’absentéisme.
La psychologie du coronarien (réel ou potentiel) - bien décrite entre autres avec le concept de comportement de type A - est peu compatible avec le mécanisme d’absentéisme et évoque même le mécanisme inverse : « work-addiction » & « workoholism ». Ces sujets ont un important besoin de contrôle subjectif de la situation et une capacité de dénier leur proprioception au-delà du commun. Certaines données actuelles confirment ce faible taux d’absentéisme pour maladies cardiovasculaires. Cependant il est vrai que le perfectionnisme et l’addiction au travail de la personnalité de type A sont théoriquement susceptibles de mener à des situations proches du « burnout », du fait d’une insatisfaction permanente du sujet par rapport à ses propres attentes envers lui-même.

Face à ce qui précède, la prévention la plus opérante en entreprise consiste à :
lutter contre les facteurs de risque traditionnels, dont le tabagisme,
prodiguer des félicitations et des encouragements,
reconnaître l’effort réalisé par le sujet,
lui laisser une latitude de manœuvre suffisante dans son travail pour qu’il en assume lui-même les tenants et aboutissants.
Pascal Janne, le vendredi 16 novembre 2012

Professeur Pascal Janne, Faculté de Psychologie et des Sciences de l’Education,
Université catholique de Louvain & CHU UCL Mont-Godinne Dinant, Belgique
pascal.janne@uclouvain.be